Réforme de la retraite : où en sommes-nous ?

Il n’aura échappé à personne que depuis quelques mois le Gouvernement a proposé et fait adopter une loi portant sur une réforme d’ampleur de notre régime de retraite de base par répartition. Fort de son expertise de conseil en épargne retraite, le Groupe Henner vous propose un décryptage dédié. Sa vocation ? Synthétiser les mesures qui constituent la réforme et vous apporter ainsi un éclairage sur cette actualité phare de la protection sociale.

Adoption définitive du texte sur la réforme des retraites par le Parlement

L’adoption du texte par le Parlement est définitive depuis le 20 mars 2023, date de rejet des deux motions de censure qui ont été déposées par les députés, à la suite du recours à la procédure de l’article 49 alinéa 3 de la Constitution par la Première ministre. Celle-ci avait engagé la responsabilité de son Gouvernement faute de certitude d’obtenir la majorité à l’Assemblée nationale. De son côté, le Sénat avait adopté le texte dégagé par la Commission Mixte Paritaire. Le 21 mars, le Conseil constitutionnel est saisi par la Première ministre et les oppositions afin qu’il se prononce, dans un délai d’un mois, sur la conformité de la loi à la Constitution.

Cet examen du texte par le Conseil constitutionnel est le dernier recours avant la promulgation de la loi.

A noter : le Gouvernement a choisi de passer par un texte budgétaire (Projet de Loi de Financement Rectificatif de la Sécurité Sociale (PLFRSS) pour 2023 portant réforme des retraites), notamment pour pouvoir utiliser l’article 47.1 de la Constitution et ainsi limiter les débats parlementaires à 50 jours. En outre, il a eu recours à l’article 44.3 pour accélérer le vote au Sénat et enfin au 49.3 pour une adoption sans vote de l’Assemblée nationale. Le Conseil constitutionnel pourrait considérer que ce choix de procédure n’était pas adapté et censurerait l’ensemble du texte. Une censure partielle serait également possible.

En parallèle, une demande de référendum d’initiative partagée (RIP) a été transmise au Conseil constitutionnel par les oppositions pour validation. Elle porte sur la limitation de l’âge légal de départ à la retraite à 62 ans. La proposition de loi sur le RIP doit être soutenue par un dixième des électeurs soit 4,87 millions de personnes et les signatures devront être recueillies dans un délai de 9 mois par l’Etat. Si ce seuil est atteint, le Parlement aura 6 mois pour examiner le texte, et à défaut il sera soumis à référendum.

Les 6 mesures essentielles de la réforme

1. Report progressif de l’âge légal de la retraite de 62 à 64 ans en 2030 (génération 1968 et suivantes) à raison de 3 mois par an à compter du 1er septembre 2023 et allongement de la durée de cotisations à 172 trimestres (43 ans) dès la génération née en 1965, pour obtenir une retraite à taux plein (relèvement d’un trimestre par an de 2023 à 2027).

Votre année de naissanceVotre âge en 2023Age légal de départ
[Avant réforme]
Nouvel âge légal
(hors départs anticipés)
Nombre de mois supplémentaires de cotisationsDurée d’assurance requise pour obtention du taux plein
[Avant réforme]
Durée d’assurance requise pour obtention du taux plein
[Avant réforme]
19606362 ans62 ans0167 trimestres0
1er janvier –
31 août 1961
6262 ans62 ans0168 trimestres0
1er septembre –
31 décembre 1961
6262 ans62 ans et 3 mois3 mois168 trimestres1
19626162 ans62 ans et 6 mois6 mois168 trimestres1
19636062 ans62 ans et 9 mois9 mois168 trimestres2
19645962 ans63 ans12 mois169 trimestres2
19655862 ans63 ans et 3 mois15 mois169 trimestres3
19665762 ans63 ans et 6 mois18 mois169 trimestres3
19675662 ans63 ans et 9 mois21 mois170 trimestres2
19685562 ans64 ans24 mois170 trimestres2
19695462 ans64 ans24 mois170 trimestres2
19705362 ans64 ans24 mois170 trimestres1
19715262 ans64 ans24 mois171 trimestres1
19725162 ans64 ans24 mois171 trimestres1
1973 et après50 et moins62 ans64 ans24 mois171 trimestres0

A noter :

2. Dispositif des carrières longues organisé autour de 4 bornes d’âge 

Personnes ayant commencé à travailler (4 ou 5 trimestres à justifier avant la borne d’âge) :

3. Mesures favorisant l’emploi des seniors

A noter également : le dispositif « cumul emploi-retraite » (reprise d’activité après avoir liquidé ses droits) ouvrira désormais de nouveaux droits qui viendront compléter le montant de la pension résultant de la 1ère liquidation, si le salarié avait liquidé ses droits à taux plein.

Par ailleurs, le dispositif de « retraite progressive » sera facilité et accessible désormais à 62 ans au lieu de 60 ans, en justifiant de 150 trimestres. Il sera par ailleurs élargi aux fonctionnaires.

4. Surcote dès 63 ans pour les mères de famille justifiant d’une carrière complète

Si elles justifient du nombre de trimestres requis pour leur génération à partir de 63 ans, les mères de famille bénéficiaires d’au moins un trimestre de majoration de durée d’assurance pour enfant, bénéficieront d’une surcote de 1,25% par trimestre supplémentaire (soit 5% maximum).

A noter : ce dispositif s’applique également aux pères qui peuvent revendiquer des trimestres au titre de l’éducation. Pour rappel les 4 trimestres de « majoration au titre de l’éducation » peuvent se répartir entre le père et la mère, dans les 6 mois qui suivent les 4 ans de l’enfant.

Avec la réforme, 2 trimestres de majoration liés à l’éducation d’un enfant seront toutefois garantis aux femmes sur les 4 octroyés. Ils s’ajouteront aux 4 trimestres de « majoration au titre de la maternité » attribués exclusivement à la mère.

5. Revalorisation du montant de la pension minimale : 1200 € brut pour les salariés ayant effectué une carrière complète à temps plein sur la base d’un Smic

6. Fin des principaux régimes spéciaux pour les futurs embauchés à partir du 1er septembre 2023. Ces salariés seront désormais affiliés au régime général pour la retraite.

« Le bonus- malus AGIRC-ARRCO » ou coefficient de solidarité) va-t-il être maintenu avec la réforme des retraites ? La question reste à trancher, cette fois par les partenaires sociaux qui pilotent le régime.

Depuis 2019, les salariés (nés à partir de 1957) sont incités à travailler 1 année supplémentaire au-delà de leur âge de départ à taux plein, par l’application d’un dispositif de « bonus-malus » :

L’objectif de ce dispositif « temporaire » était de rétablir l’équilibre financier des régimes complémentaires. Compte tenu de l’atteinte de cet objectif d’une part et de la réforme des retraites qui porte désormais l’âge légal à 64 ans d’autre part : la question de son maintien se pose pleinement !

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